Au creux du Golfe persique, du côté iranien, la Baie de Musa accueille une biodiversité extraordinaire, notamment dans les marais protégés de Shadegan. Les systèmes de drainage dendritiques que nous voyons apparaître ici rappellent les branches d’un arbre aquatique qui survit dans un désert aride et inhospitalier. Mais l’eau pourrait bien définitivement s’évaporer de la région, au détriment des animaux, des végétaux mais aussi de la population locale…
Cette région iranienne, appelée le Khouzistan, était autrefois un pays florissant. L’un des plus anciens et des plus riches de toute l’histoire humaine. L’abondance de l’eau et la fertilité des sols ont longtemps fait de cette région une terre riche et bien dotée autour de sa grande capitale Suse – ou Susa qui a donné son nom à la Province actuelle.
La baie de Musa est aujourd’hui un estuaire peu profond avec une longue histoire de plaque tournante du transport maritime: à l’époque classique, les navigateurs grecs utilisaient la zone pour le commerce avec les peuples de Mésopotamie et elle abrite aujourd’hui le Bandar-e Emam Khomeyni (BEK), l’un des plus grands ports pétrolier et gazier d’Iran. Les eaux de la baie sont pures, à l’exception de la zone qui plonge dans le Golfe où de nombreuses installations de raffinage de pétrole brut déversent de nombreux déchets pétrochimiques..
On trouve pourtant de nombreuses espèces de poissons antiques et rarissimes dans la région, près de l’île de Qeshm. Les martins-pêcheurs tachetés font partie des espèces protégées de la baie, avec les baleines et les dauphins. La région reste aussi la plus productive d’Iran en matière agricole. La variété des productions telles que le blé, l’orge, les oléagineux, le riz, l’eucalyptus, les herbes médicinales ; mais aussi de nombreuses plantations de palmiers et d’agrumes compte parmi les plus fertiles du pays. En se dirigeant vers le nord et l’est, la proximité de montagnes devient propice à la culture des olives, et bien sûr de la canne à sucre, dont le Khouzistan tire son nom antique.
Mais bien sûr, ce n’est pas tout. Le Khouzistan détient 80 % des réserves pétrolières terrestres de l’Iran, ce qui le rend indispensable à l’économie iranienne. La menace écosystémique principale de la région, c’est l’eau. Toute la zone est concernée par un stress hydrique de plus en plus intense. Pas seulement en raison des changements climatiques mais aussi en raison de choix d’infrastructures défavorables aux équilibres hydrologiques.
Les barrages.Depuis 2020, la colère monte dans la population tandis que les pénuries d’eau s’aggravent en raison d’une multiplication extraordinaire des centrales hydroélectriques. 650 barrages ont été construits dans une région auparavant considérée comme le grenier de l’Iran. Les conséquences sont dramatiques pour la terre et la population. À la suite de ces constructions, l’eau des rivières est devenue salée, asséchant les terres cultivées et rendant la consommation impropre pour les animaux et les habitants.
Par effet de système, tous les habitants de la région, hommes et animaux, pourraient manquer d’eau douce.